Bandeau
L’Essaillon
« Entre la Tourre et lou Crapoun,
I a moun païs, qu’ei Sederoun »
Alfred Bonnefoy-Debaïs

Etudier, préserver et faire connaître le Patrimoine Historique, Naturel et Culturel de Séderon et de sa Région

Pendant de temps-là : les civils à Séderon…
Article mis en ligne le 1er décembre 2018
dernière modification le 19 août 2022

par ANDRIANT Sandy-Pascal

2018 a permis aux Français de se souvenir de la 1e Guerre Mondiale à travers l’ensemble des manifestations nationales et locales du Centenaire 1914-1918 auxquelles nous n’avons pas failli grâce à notre exposition estivale.

Voici une autre manière de se remémorer les difficultés de la vie des civils.

Le travail d’inventaire des archives municipales de Séderon m’a appris, à travers plusieurs documents, que des réfugiés avaient été accueillis durant la dernière année de la 1e Guerre Mondiale.

Familles ou individus seuls ? Quels événements de 1917 ont pu pousser à l’exode des personnes venues de l’Aisne ? Pourquoi avoir choisi un refuge dans une région aussi éloignée et de langue si différente ? Quel accueil leur a-t-il été réservé ?

Je vous propose de partager les éléments de réponse que j’ai pu réunir.

Les Évacués [1]

1. Essigny-le-Petit (Aisne)

2. Saint-Quentin (Aisne)

3. Tergnier (Aisne)

4. Fresnes-sous-Coucy (Aisne)

5. Folembray (Aisne)

6. Condé-lès-Vouziers (Ardennes)

7. Chauny (Aisne)

8. Grand-Quevilly (Seine-Maritime)

9. Leuze (Aisne)

Premier groupe de réfugiés

L’entête du « Service des Réfugiés de la Drôme » nous laisse supposer qu’ils ont été regroupés à Leuze (Aisne) dont ils sont partis le 7 janvier 1918 pour traverser la France jusqu’à Séderon. On ne dispose que de très peu d’indications sur leurs conditions de voyage : à pied, par convoi, transport…

« Évacués arrivés à Séderon le mardi 5 février 1918 ».
  1. Lemaire, femme Hélin, Marthe née le 21-04-1874 à Essigny-le-Petit, arrondissement de Saint-Quentin, matelassière à Tergnier, venant de Leuze (Aisne) ; partie le 7 mars chez Mme Simonet 56 bd La Chappelle Paris 18°.
    • Hélin Jeanne née le 14-07-1896 à Tergnier y domiciliée, venant de Leuze ; partie le même jour que sa mère citée plus haut.
    • Hélin Renée, née le 04-01-1917 à Tergnier ; partie le même jour que sa mère citée plus haut.
      Marthe Lemaire a épousé Arthur Emile Hélin, ajusteur, le 22-12-1898 à Tergnier. Ils ont eu d’autres enfants qui – bien qu’ayant survécu au conflit – ne font pas partie de l’exode : Madeleine Suzanne Marthe (1894-1955) et Raymonde Marie (1898-). (Source : Généanet)
  2. Douvry, femme Boileau, Louise née le 09-03-1872 à Fresnes-sous-Coucy, manouvrière à Folembray ; venant de Leuze (Aisne) ; partie le 14 mars 1918 chez Mme Boileau Suzanne 99 rue des Maraîchers Paris 20°.
  3. Paquil, femme Macadré, Yvonne, née le 04-12-1888 à Condé-lès-Vouziers (Ardennes), domiciliée à Chauny, venant de Leuze (Aisne) ; partie le 23 février 1918 chez son beau-frère Macadré, Grand-Quevilly côté Saint-Gobain (Seine Inférieure).
    • Macadré Pierre, né le 02-04-1917 à Leuze (Aisne) ; venant et parti le même jour avec sa mère.

A noter que la petite Renée Hélin est âgée d’à peine plus d’un an et que Pierre Macadré n’a que 10 mois. Bien jeunes pour supporter un si long voyage !

Pierre Yvon Macadré participera à la IIe Guerre Mondiale sur la Base Aéronautique Navale de Dakar. Mort accidentellement en service le 05-07-1940 à l’aéroport de Medouina (Maroc). « Mort pour la France ». (Source : Généanet)

Le mémoire des frais engagés par la municipalité nous indique qu’ils ont été transportés depuis la gare du Buis à Séderon par Étienne Coullet.

Ils sont été hébergés à l’Hôtel des Voyageurs (Bonnefoy), du mardi 5 au vendredi 8 février, pendant que la mairie leur fait préparer un logement : Henri Imbert, maçon, répare 2 cheminées le 06-02-1918.

On leur fournit quelques meubles, de la vaisselle (Casimir Jarjayes) ; Arnoux Brie, Gustave Coste et Jullien ressemellent leurs chaussures ; Louis Beauchamp fournit du bois de chauffage ; Maria Plaindoux de l’épicerie et Aurélien Constantin de la vaisselle et des tuyaux de poêle ; tandis que Daniel Arvieu fournit 2 paires de chaussures pour femme.

Dès le 9 février, ils quittent l’hôtel et prennent possession du logement pour lequel Paul Amic remet 2 clés.

Apparaît également Gabert comme fournisseur, sans détail des biens donnés.

On a pu lire plus haut que Mme Macadré – et son nourrisson de 10 mois – n’a séjourné à Séderon qu’une quinzaine de jours pour repartir dès le 23 février 1918 rejoindre sa belle-famille au Grand-Quevilly en Seine Inférieure devenue Seine-Maritime.

Mme Hélin – et ses 2 enfants – est partie chez sa belle-mère à Paris le 7 mars 1918 après un séjour d’un mois à Séderon.

Quant à Mme Boileau – dont je n’ai pas retrouvé la trace – elle est restée jusqu’au 14 mars 1918 avant d’aller chez sa belle-mère à Paris. La seule facture personnalisée la concerne : Gustave Coste ressemelle et change les talons de ses chaussures le 24 février.

À noter encore que c’est Paul Sautel qui a été chargé de les ramener au Buis.

Second groupe de réfugiés

1. Étreillers (Aisne)

2. Montescourt-Lizerolles (Aisne)

3. Amiens (Somme)

4. Lamorlaye (Oise)

5. Aulnoye-Aymeries (Nord)

6. Fluquières (Aisne)

7. Roupy (Aisne)

8. Nesle (Somme)

9. Gognies-Chaussée (Nord)

« Évacués arrivés à Séderon le mardi 25 avril 1918, évacués d’Amiens ».
  1. Piot Julienne née Gossart, à Étreillers (Aisne) le 01-09-1878, domiciliée à Montescourt-Lizerolles (Aisne) ; mariée à Piot Stéphane né à Étreillers le 28-04-1878
    • Piot Stéphane né à Étreillers le 24-12-1902
    • Piot Julienne née à Montescourt-Lizerolles, le 10-12-1910
    • Piot Paulette née à Amiens le 03-07-1917 (9 mois !)
  2. Blondiaux née Gossart Julie à Étreillers le 19-02-1875 domiciliée avec son mari à Fluquières par Roupy (Aisne) ; mariée à Blondiaux Henri, né le 24 mars 1878 à Roupy (Aisne)
    • Blondiaux André, né le 07-10-1909 à Fluquières (Aisne)
« Évacués arrivés à Séderon le 11 août 1918 »

3. Gossart Andrée Virginie née Bellavoine à Drucat, Abbeville (Somme) le 07-11-1894, domiciliée avec son mari à Amiens ; mariée à Gossart Georges Henri né à Fluquières le 28-12-1899, mobilisé à Valence, vient de Courmesnil (Orne) ; évacuée d’Amiens.

    • Gossart Andrée Reine Marguerite née le 10-04-1914 à Amiens (Somme)
« Évacués arrivés à Séderon le 17 août 1918 »

4. Gossart Jules Pierre Joseph, né le 08-10-1859 à Fluquières (Aisne) veuf de Dathy Louise Aurélia Hyacinthe ; vient de Savasse (Drôme), évacué d’Amiens.

On remarque immédiatement qu’il s’agit des membres de la famille Gossart qui sont regroupés à Séderon où ils resteront longtemps.

Julie Gossart est en réalité Marie Louise Julie, mariée avec Henri Joseph Firmin Blondiaux, tisseur.

Julienne Gossart épouse Joseph Amant Stéphane Piot, maçon, à Fluquières.

Toutes deux, ainsi que Georges Henri Gossart, l’époux d’Andrée Virginie Bellavoine, enfants de Jules Pierre Joseph Gossart tisseur, et de Louise Aurélia Hyacinthe Dathy, manouvrière, demeurant à Amiens (Somme) où elle est décédée le 29-09-1911.

Jules Pierre Joseph Gossart, dernier arrivé, est le père de cette famille très nombreuse de 17 enfants nés entre 1877 et 1899.

Trois des garçons de cette famille sont « Morts pour la France » en 1915 et 1916. Ce qui explique peut-être ce regroupement familial important.

Nous disposons d’un mémoire des premiers frais engagés.

C’est encore Étienne Coullet qui a assuré le transfert de Buis à Séderon et Bonnefoy qui les fait dormir 2 jours.

Les boucheries Moutin et Girard fournissent de la viande ; Gay (de Vers), des pommes de terre ; Marie Richaud « Nouveautés », 2 robes ; Tindille, une robe et sa garniture ; Coste un ressemelage ; Jullien, 1 paire de chaussures enfant et une casquette ; la maison Jacques Andréis fournit des robes, des tricots et des culottes pour enfants ; Monnard, de l’épicerie.

Cité sans détail : Casimir Jarjayes.


Un document important nous fait revenir au jour de leur arrivée.

L’instituteur et secrétaire de mairie, Roman, écrit dès l’arrivée du premier groupe de cette famille :

Séderon le 27 avril 1918


L’Instituteur de Séderon, Roman à Monsieur


l’Inspecteur d’Académie à Valence (Drôme)


Monsieur l’Inspecteur d’Académie,
Il est arrivé à Séderon jeudi dernier 25 avril 1917 [2] les évacués d’Amiens, suivant :
1. Mme Piot née Gossart Julienne, née à Étreillers (Aisne) le 1° septembre 1878, domiciliée avant la mobilisation à Montescourt-Lizerolles (Aisne), mariée à Piot Stéphane né à Étreillers (Aisne) le 28 avril 1875, domicilié avec sa femme ; mère de Piot Augusta, née à Étreillers (Aisne) le 2 juin 1901, domiciliée avant la mobilisation avec sa famille.Mme Piot est arrivée à Séderon avec ses enfants.

  • Piot Stéphane né à Étreillers le 24 décembre 1902,
  • Piot Julienne née à Montescourt-Lizerolles le 17 décembre 1910,
  • Piot Paulette née à Amiens (Somme) le 3 juillet 1917.

Mme Piot n’a plus eu de nouvelles de son mari et de sa fille aînée Piot Augusta depuis le 10 février 1917, date à laquelle elle a été rapatriée de Montescourt-Lizerolles à Lamorlaye (Oise) puis Amiens le 12 avril 1917.
Le 10 février 1917 M. Piot et sa fille Piot Augusta ont été enlevés par l’autorité allemande pour être amenés à Emery près d’Aulnay (Aulnoye-Aymeries). Au mois de juin 1917, ils étaient encore dans ce pays. Je vous prie Monsieur l’Inspecteur d’Académie de vouloir bien me dire s’il n’y aurait pas possibilité et les démarches à faire pour faire avoir des nouvelles de son mari et de sa fille à Madame Piot qui est très inquiète.

2. Madame Blondiaux née Gossart Julie, née à Étreillers (Aisne) le 19 février 1875, domiciliée à Fluquières par Roupy (Aisne) mariée à Blondiaux Henri né le 24 mars 1857 à Roupy, mère de Blondiaux Henriette née le 21 janvier 1898 à Fluquières.
Madame Blondiaux est arrivée à Séderon avec son autre fils : Blondiaux André né le 7 octobre 1909 à Fluquières.
Elle n’a plus eu des nouvelles de son mari et de sa fille aînée depuis le 13 février 1917, date à laquelle ils ont été enlevés par l’autorité allemande pour être amenés à Gognies-Chaussée où ils étaient encore au mois de juin dernier 1917. Depuis, Mme Blondiaux n’a plus eu de leurs nouvelles. Elle a été rapatriée avec son fils André d’abord à Nesle (Somme) le 22 février 1917 puis le 2 avril 1917 à Amiens.

Je vous prie, Monsieur l’Inspecteur d’Académie, de vouloir me dire les formalités à faire pour donner des nouvelles de son mari et de sa fille à Mme Blondiaux.

Je vous prie d’agréer Monsieur l’Inspecteur d’Académie, l’expression de mon profond respect.

L’instituteur de Séderon
Roman.

Roman troque la blouse pour les manches de lustrine afin de noter les dates de départ de cette famille.

Mme Blondiaux, part le 27 décembre 1918, un mois après l’Armistice.

Suivie par Mme Gossart née Bellavoine le lendemain.

Le père, Jules Gossart part le 1er février 1919.

Mme Piot et ses enfants quittent Séderon le 08 novembre 1919, soit 1 an et demi après leur arrivée !

Un très long séjour à la charge de la population locale et de l’école communale pour les enfants.

Rappelons qu’outre les démarches en vue de la recherche des familles, Mr Roman a dû accueillir à l’école 4 enfants dont le « parler » devait être bien éloigné de l’accent provençal :

  • Piot Stéphane né à Étreillers le 24-12-1902
  • Piot Julienne née à Montescourt-Lizerolles, le 10-12-1910
  • Blondiaux André, né le 07-10-1909 à Fluquières (Aisne)
  • Gossart Andrée Reine Marguerite née le 10-04-1914 à Amiens (Somme)

Des « fake news » déjà !

À l’été 1917, la Sous-Préfecture de Nyons envoie aux maires de l’arrondissement la lettre ci-dessous :

Sous-Préfecture
de Nyons
Cabinet
du Sous-Préfet
Nyons, le 27 juillet 1917.


Monsieur le Maire,
Un bruit des plus fâcheux et contraire à la Défense Nationale s’est répandu dans l’arrondissement.
Quelques personnes mal renseignées, sans doute, pensent qu’en négligeant les cultures, en évitant d’ensemencer leurs champs, elles avanceront la fin de la guerre.
Des conseils dans ce sens seraient venus de quelques-uns de nos soldats dans les lettres à leurs familles.
J’ai peine à y croire.Mais il est de la plus simple évidence que le contraire s’impose, et l’on comprend facilement que la Victoire doit rester à celui qui tiendra le plus longtemps. Pour tenir il faut être approvisionné, et si les munitions de guerre sont utiles, les vivres sont indispensables ; les produits de l’agriculture viennent en première ligne.C’est ce que vous pensez, Monsieur le Maire, et je compte sur vos conseils éclairés, sur votre patriotisme pour amener vos administrés à comprendre sainement la situation et, par une intensification des cultures, à concourir, chacun pour sa part à rapprocher la Victoire.

Le Sous-Préfet
Jean Roumengou


Prière d’afficher

Parallèlement, le premier groupe de réfugié était « accompagné » de papiers officiels.

Renseignements sur situation de la commune de Leuze
département de l’Aisne
fournis par des Rapatriés ayant quitté la commune à la date du 7 janvier 1918...

A Leuze aucun immeuble incendié ou détruit ni pillé.
La population civile n’avait pas de quoi manger. Elle était rationnée.
200 grammes de riz, 77 g de café ou bien souvent de la mokaline, 330 g de biscuit pour 10 jours.
250 g de pain par jour : homme, femme, pain noir contenant du chènevis, de la farine de lin, de la sciure de bois et du verre pilé, ce dernier pour faire le poids.
500 g de saindoux ou lard ou viande salée tous les 10 jours.
Pour les enfants, 1 kg de phosphatine de 0 à 3 ans, une boîte de lait concentré, 1/5° de litre, 100 g de cacao pour les enfants de 0 à 18 mois.
Les Allemands vendaient 1 litre de lait pour les enfants, et les malades tous les jours.
Le ravitaillement était fait par les Américains. Avant la déclaration de la guerre de l’Amérique à l’Allemagne, celle-ci avait respecté le ravitaillement. Après il n’en fut plus ainsi. La ration de la population fut réduite de moitié. Les Allemands gardaient la bonne farine pour fabriquer le pain dont la composition est citée plus haut.Les personnes interrogées ignorent le prix des diverses denrées, étant évacuées.
La population ne touchait aucun légume ni pommes de terre ni carottes.
Les habitants n’étaient pas maltraités. Défense de quitter le pays dans un rayon de 50 m. Défense d’écrire en pays envahi, d’un pays à l’autre. Défense de sortir de la maison après six heures du soir, même en été, pas même sur le pas de la porte.
Les fausses nouvelles étaient répandues à profusion pour la démoralisation notamment que les destructions étaient faites systématiquement par les Anglais ou les Français qui, disaient-ils, étaient dépourvus des principaux aliments. La population de Tergnier a été empêchée de sortir pendant 3 dimanches pour avoir refusé de saluer les officiers allemands.
Les voies de communication étaient très bien entretenues. Les rues devaient être très propres, de même que les écuries et les cabinets d’aisance. Amende était imposée aux personnes n’observant les instructions. Les Allemands ont adapté pour leurs besoins les usines et fabriques et ont tout démonté ce qui pouvait se transporter en Allemagne, surtout la laine.
La population était taxée de fortes contributions. Tous les outils aratoires, de plus certains ustensiles de ménage et machines à coudre étaient réquisitionnés gratuitement. Point de bicyclette, pas de voiture à la disposition de la population.
Les peaux de lapin, chiffons de coton étaient ramassés minutieusement. Les œufs, les lapins, les poules et tout ce qui sert à l’alimentation était réquisitionné gratuitement par la Kommandantur. La monnaie était réquisitionnée.
Prix des denrées en Belgique :
– Pain 7 f le kg – café 30 f. – 1 litre de pétrole 27 f – une paire de chaussures pour enfants 115 f, pour grande personne 175 f à 180 f, une paire de sabots de bois 5 f, une paire de bas 10 f, le beurre 11 f 50 la livre, le lait 1 f 10 le litre, un œuf 1 f 25. La viande 16 f le kg. La charcuterie 12 f, le savon 20 f le kg et de mauvaise qualité. Une boite de sardine de 5 ou 6 deux francs. Le vin et la bière inconnus.

Il est difficile de comparer les prix des denrées entre la Belgique, pays occupé par l’armée allemande, et le sud de la France, libre, car les Allemands avaient imposé en Belgique le système des tickets de ravitaillement et de la monnaie de nécessité.

Séderon dans la grande tourmente de 1917

Pourquoi évacuer la population du Nord à ce moment-là précisément ?

Petit Journal du 29 mars 1917

Durant la Première Guerre mondiale, les départements français éloignés du front furent sollicités pour accueillir blessés et populations des zones dévastées.

Évacués par les autorités françaises avant les combats ou bien « bouches inutiles » renvoyées par l’occupant allemand via la Suisse et Annemasse, des villages entiers furent acheminés jusqu’aux gares les plus proches puis via de grandes gares de triage et routage en direction de toute la France, et notamment du Sud-Est (en passant en général par Évian, principal centre de triage des réfugiés où plus de 370 000 passèrent entre 1917 et 1919 [3], et Annemasse en Haute-Savoie).

Dès le début du conflit, la panique se répand dans la population civile :

« Les gens s’affolèrent, surtout après avoir lu la proclamation du Conseil municipal déclarant (…) qu’il fallait s’attendre à voir les envahisseurs dans la ville et recommander à tous le calme et le sang-froid (…) le bruit d’une déroute se répandait. C’était 70 de nouveau ! » Mme Varlet, Aisne.

Les départements du Nord, Pas-de-Calais et Aisne ont été le théâtre d’importants combats en 1917. Ce qui explique l’évacuation de la population civile.

La bataille d’Arras est une offensive britannique, canadienne, australienne, néo-zélandaise et terre-neuvienne contre les troupes allemandes qui eut lieu à Arras en France du 9 avril au 16 mai 1917 pendant la Première Guerre mondiale.

La bataille du Chemin des Dames, aussi appelée seconde bataille de l’Aisne ou « offensive Nivelle » a lieu pendant la Première Guerre mondiale. Elle commence le 16 avril 1917 à 6 heures du matin par la tentative française de rupture du front allemand entre Soissons et Reims vers Laon, sous les ordres du général Nivelle : « L’heure est venue, confiance, courage et vive la France ! ». La bataille se prolonge jusqu’au 24 octobre 1917 avec des résultats stratégiques discutés et de très lourdes pertes humaines dans les deux camps.

La bataille de Cambrai est une bataille de la Première Guerre mondiale qui s’est déroulée du 20 novembre au 7 décembre 1917 aux environs de Cambrai. Lors de cette offensive, les Britanniques ont utilisé pour la première fois en masse des chars d’assaut (en anglais tank, « réservoir »), les Mark IV. Cette offensive, initialement une réussite, fut cependant largement entamée par la contre-offensive allemande.

(Wikipedia – Portail de la 1e Guerre Mondiale)

Le départ n’a pas toujours été prévu, et il est synonyme de perte de tout, de fatigue, de peur, de longue marche, de faim.

Simonne Baligout, 13 ans : « Nous suivons la foule, nous sommes groupés par villages ; une pluie fine tombait, nous étions glacées, nous avions de la boue jusqu’en haut des souliers ; une pauvre femme d’Époye avait cinq petits enfants ; il fallait en porter trois, les deux autres pouvaient marcher seuls : ils étaient âgés, l’un de six ans, l’autre de quatre ; elle avait beaucoup de paquets, dans le train, elle avait déchaussé les deux plus petits et n’ayant pas eu le temps de leur relacer les souliers, ils les ont perdus dans la boue ; malgré tout le monde qui l’aidait, elle avait bien de la peine. […] Les gens du pays viennent nous vendre du lait, des œufs, du chocolat et des chaussures car nous en avons grand besoin ; ceux qui avaient de l’argent ont pu s’empêcher de mourir, car la nourriture était insuffisante ».


Évacuations volontaires ou forcées, peu importe, ceux-là ont réussi à trouver refuge à Séderon après un parcours des plus périlleux et épuisant. Halte à Valence, à Savasse, au Buis… C’est tout ce qu’on sait d’après les documents retrouvés.

Bien que probablement contrainte par l’Administration, Séderon n’a pas failli aux lois de l’hospitalité et de la solidarité. Les documents retrouvés montrent bien que les commerçants ont fait plus que le strict minimum, sans parler de la population dont on trouve quelques notes au crayon de ce qu’elle a apporté : 2 lits complets, 1 couverture piquée, 6 chaises, 1 table, 1 table de toilette avec glace, 1 poêle à frire, 1 poêle-cuisinière à 3 trous, 2 berceaux, 1 chaise.

L’instituteur s’est mis en quatre pour aider ces femmes à avoir des nouvelles de leurs époux prisonniers.

On imagine que les élus ne sont pas restés en reste et ont fait une démarche parallèle.

Les descendants de quelques-unes de ces familles que j’ai pu contacter par Généanet ont été très contents de découvrir une partie du parcours chaotique de leurs parents à la fin de la Guerre.

Un bel effort d’accueil de personnes en grande difficulté ayant tout perdu, dont notre commune peut être fière.

Sandy-Pascal ANDRIANT